Cours, année universitaire 2003/2004

Robert DAVREU
1er semestre lundi 9h-11h30
Traduction et tradition

Un adage bien connu veut que le traducteur soit un traître. L’on entend généralement par là que traduire est, par définition, impossible, que la traduction, de même que les ombres de la caverne platonicienne, est vouée à n’être qu’un pâle reflet de l’original, image dégradée et leurrante de la forme archétypale, éclatante et pure. Ce n’est peut-être pas faux. Mais s’arrêter là c’est méconnaître que l’œuvre dite originale est sans doute elle-même un genre de traduction, dans le rapport à une origine - sans même parler des sources - qui, en elle, dans sa langue, à la fois se dit et se perd, selon ce qui constitue sans doute l’ambiguïté fondamentale du langage. Pour impossible qu’elle soit, la traduction seconde (d’une oeuvre dite originale dans une autre langue) n’est donc malgré tout possible que par une expérience commune de la perte, que par une connivence de l’auteur et de son traducteur dans l’épreuve d’une insuffisance qui fait de tous deux des traîtres en même temps que des êtres parlants. Et c’est précisément ainsi, dans cette perte d’elle-même qu’est toute parole en toute langue, que l’origine ne cesse de se régénérer, de se délivrer (tradere), de se trahir, c’est-à-dire de se révéler, de s’enrichir aussi en diversifiant au sein de son unité, jusqu’à en devenir parfois méconnaissable. De là à penser que c’est la traduction qui fait origine il n’y a qu’un pas. Traduire, dès lors, ce serait “jouer à qui perd gagne”.
C’est à explorer les modalités de la perte et du gain au cours de ces tours et de ces détours par l’étranger que l’on entend se consacrer dans cette U.V., en se centrant sur quelques thèmes et traditions littéraires en occident (la tradition orphique par exemple ou celle des troubadours). Les choix arrêtés ainsi qu’une bibliographie détaillée seront communiqués aux étudiants lors de la première séance.

Bibliographie sommaire d’ouvrages consacrés à la traduction
Valéry Larbaud : Sous l’invocation de Saint-Jérôme (Gallimard)
Georges Steiner : Après Babel (Albin Michel)
Antoine Berman : “Critique, commentaire et traductions” in Po&sie n°3 (Belin)
L’épreuve de l’étranger (Gallimard)

 

Robert DAVREU
1er semestre lundi 14h - 16h30
Poésie romantique et théorie platonicienne de l’amour

Alors même qu’ils remettent en cause les fondements du rationalisme classique (séparation de l’âme et du corps, du sujet et de l’objet, etc.), un certain nombre de poètes dits “romantiques” n’hésitent pas à tenter de s’en réapproprier la source : à savoir, la philosophie de Platon, qui prétendait pourtant exclure les poètes de la cité (cf République, Livre X). Une telle tentative prend significativement pour point d’appui la théorie platonicienne de l’Amour (ainsi que certains de ses avatars), telle qu’elle est exposée dans le Banquet et dans le Phèdre.
Il s’agira de mesurer la portée d’une telle tentative à travers
1°) Une lecture (ou relecture) de Platon (Le Banquet et le Phèdre)
2°) Un examen du devenir de cette théorie chez quelques poètes comme Shelley et Keats en Angleterre, ou Baudelaire en France.

La bibliographie sera fournie aux étudiants lors de la première séance.

< Retour > < Suite >